Sen24.info – (Dakar) La caution pour les élections locales et départementales continue de diviser les acteurs politiques de la majorité présidentielle, une partie de l’opposition et des non alignés. Si lors de la rencontre des partis et coalitions de partis politiques convoquée par le ministre de l’intérieur Antoine Félix Diom, la majorité présidentielle propose une caution de vingt millions pour chaque type d’élection, une partie de l’opposition et du pôle des non alignés rejette cette proposition de la mouvance présidentielle et propose un montant de cinq millions pour chaque élection.
Benoît Sambou (pôle de la majorité) : « si nous ne prenons pas garde, nous allons nous retrouver avec des centaines de milliers voire des millions de listes »
Pour Benoît Sambou, le représentant de la majorité présidentielle à cette rencontre, afin d’éviter la floraison de candidatures ainsi que les sabotages du genre pour rendre difficile l’organisation des prochaines élections, la majorité présidentielle propose que la caution soit fixée à un montant de vingt millions de francs. Car dira toujours Benoît Sambou un aspect important qui mérite d’être rappelé, c’est que l’organisation des élections coûte très cher au Sénégal.
« La position de la majorité a été constante. Lors du dialogue nous avions rappelé que lors des élections locales de 2014, il y avait une flopée de listes à travers le pays, ce qui avait rendu difficile l’organisation des élections. Alors que ces élections ne concernaient que les partis politiques. En 2016, nous nous sommes dotés d’une nouvelle constitution qui ouvre la voie aux indépendants et la libre participation à toute forme d’élections, notamment les élections locales. Et si nous ne prenons pas garde, nous allons nous retrouver avec des centaines de milliers de listes qui feront courir le risque à notre pays, de connaître des élections très mal organisées ou encore un système électoral décrédibilisé.
L’autre aspect c’est aussi que l’organisation d’élections dans notre pays coûte excessivement cher et il est important que les acteurs qui participent à ses élections organisent le financement de ces élections. Pour éviter aussi les sabotages pour ne pas que des gens s’amusent à proposer des candidatures fantômes, c’est pourquoi nous avons proposé au gouvernement de fixer le montant de la caution à vingt millions pour chaque type d’élection, c’est-à-dire que pour les élections municipales que la caution soit fixée à vingt millions ainsi que les élections départementales », précisera le représentant de la majorité présidentielle.
Aldiouma Sow (pôle de l’opposition) : « La caution ne doit pas être un prétexte pour remettre en cause la liberté de candidature »
Une proposition dégagée en touche par l’opposition. Selon Aldiouma Sow, le porte-parole du pôle de l’opposition à cette rencontre avec le ministre de l’intérieur, la caution ne doit pas être un prétexte pour remettre en cause la liberté de candidature. C’est dans ce sens que l’opposition propose un montant de cinq millions pour chaque élection. « L’opposition est restée cohérente dans sa proposition initiale. C’est-à-dire celle que nous avions faite lorsque ce point a été abordé lors de la commission du dialogue politique. Nous avons proposé dix millions à raison de cinq millions pour chaque type d’élection. Il est important de rappeler que cette proposition entre en droite ligne avec la recommandation faite par les experts évaluateurs sur la question de la caution.
Pour rappel, les experts évaluateurs avaient dit que la caution doit être fixée à un montant raisonnable de sorte qu’elles ne remettent pas en cause la liberté de candidature. Parce que l’enjeu aujourd’hui c’est de préserver la liberté de candidature. Mais au-delà, puisqu’il s’agit d’élections locales, il s’agit surtout de préserver le mouvement associatif local sans lequel ce second pilier de la décentralisation à savoir la participation perd tout son sens. C’est pourquoi nous avons rappelé au ministre de l’intérieur qu’il n’est pas en état de pouvoir discrétionnaire parce que son esprit doit le lier avec l’histoire. C’est-à-dire qu’il ne doit pas faire moins que ses prédécesseurs avaient fait en 2008. Autrement dit nous devons éviter que le montant de la caution ne puisse pas être un prétexte, une occasion que le pouvoir en place va utiliser pour remettre en cause la liberté de candidature », soulignera ainsi Aldiouma Sow porte-parole du pôle de l’opposition, par ailleurs, le chargé des élections de Pastef/Les Patriotes.
Déthié Faye (Pôle des non alignés) : « Les acteurs politiques ne doivent pas laisser la manœuvre au ministre de l’intérieur »
Une idée que partage aussi le Pôle des non-alignés. Leur coordinateur Déthié Faye, estime que pour la fixation de la caution pour les prochaines élections, les acteurs politiques ne doivent pas laisser la manœuvre au ministre de l’intérieur. Pour le coordinateur du pôle des non-alignés, si le gouvernement veut accompagner le processus du dialogue politique, initié par le chef de l’État afin de consolider la démocratie, il faudrait qu’il accepte de fixer un montant qui ne sera pas excessif, c’est à dire cinq millions de francs.
« Nous avons participé effectivement à la rencontre de ce matin à l’occasion de laquelle nous avons rappelé la position que nous avions déjà exprimée ici en décembre 2019, quand on préparait les élections locales qui étaient prévues en décembre de cette année, c’est-à-dire que la caution ne devrait pas être un moyen censure, un moyen d’exclure des citoyens qui bénéficient de la confiance de la base. Pour cette raison, nous avions estimé que le montant raisonnable consisterait à fixer, pour les élections municipales un montant de cinq millions ainsi que pour les élections départementales. Et c’est cette position que nous défendons depuis 2019 et c’est aussi ce que nous avons réitéré ici. Car nous considérons que si le gouvernement veut accompagner la dynamique déclenchée par la commission du dialogue politique initié par le président de la République pour la restauration de la confiance entre acteurs pour la consolidation de la démocratie, il faudrait que le gouvernement accepte de fixer un montant qui ne soit pas excessif, c’est-à-dire raisonnable comme recommandé par les experts chargés de l’évaluation du processus électoral.
La majorité propose vingt millions mais nous pensons que c’est de la diversion pour laisser une large manœuvre au ministre de l’intérieur parce qu’on ne peut pas pour l’élection présidentielle demander une caution de vingt-cinq millions, demander une caution de quinze millions pour les législatives et maintenant pour les élections territoriales demander quarante millions, cela n’a pas de sens », proposera aussi Déthié Faye.
Une position loin d’être partagée par la coalition Guem Sa Bopp, qui dira par son représentant, Kalidou Niasse, « sans aller dans le sens de soutien au gouvernement, nous proposons que la caution soit maintenue à vingt millions de francs pour barrer la route aux saboteurs. »
Une divergence de points de vue qui nécessite l’arbitrage du président de la République et de son ministre chargé des élections pour enfin déterminer le montant exact de la caution dont devraient s’acquitter les partis politiques, mouvements et coalitions de partis afin de pouvoir prendre part à ces prochaines joutes électorales…
Dakaractu