Sen24.info – (Dakar) Les talibans continuent de gagner du terrain alors que les troupes étrangères poursuivent leur retrait qui sera total avant le 11 septembre. Dans le nord du pays, les insurgés ont lancé plusieurs offensives majeures ces dernières semaines. Ce vendredi 9 juillet, ils prétendent contrôler 85% du pays. Alors que les talibans encerclent les capitales provinciales, l’inquiétude grandit au sein de la population.
Devant les murs de béton armé qui entourent l’ambassade d’Iran à Kaboul un attroupement s’est formé à l’abri du soleil. Ahmad Khaled, patiente depuis plusieurs heures, une pochette en plastique remplie de documents, dans les mains. Il redoute l’arrivée des talibans dans la capitale. « Ils arrivent. Ils sont en train de capturer toutes les provinces. Ils peuvent facilement prendre Kaboul. Je suis un ancien policier. Ils vont me mettre en prison ou peut-être pire », dit-il.
Les ambassades étrangères sont débordées par les demandes de visa. Nusar Ahmad facilite les démarches grâce à ses contacts. Il propose ses services contre 50 000 afghanis, soit 516 euros contre 123 euros il y a quelques mois.
« Les demandes ont augmenté de 80%, constate Nusar Ahmad. Les gens viennent de Mazar-e-Sharif, de Kunduz, de Pol-e-Khomri, partout où il y a des combats. Ceux qui veulent des visas sont des policiers, des militaires, des gens qui ont travaillé pour les étrangers. Ils ont peur à cause de la guerre. Il y a quatre jours, un homme m’a demandé un visa pour toute sa famille. Il avait vendu tout ce qu’il avait pour payer. » Une partie de la population afghane craint que le pays ne replonge dans les années sombres du régime taliban des années 1990.
Les talibans contrôleraient déjà un tiers du territoire afghan. Ils ont toutefois affirmé vendredi 9 juillet qu’ils avaient pris le contrôle de 85% du territoire de l’Afghanistan, dont le plus important poste-frontière avec l’Iran, dans le cadre d’une offensive qu’ils mènent contre les forces de Kaboul. Lors d’une conférence de presse à Moscou, Shahabuddin Delawar, un représentant taliban, a ajouté qu’environ 250 des 398 districts du pays étaient désormais sous le contrôle des insurgés. Ces affirmations n’ont pas encore été confirmées de source indépendante.
Prise d’un poste frontière
Les talibans tiennent désormais un arc de territoires s’étendant de la frontière iranienne, à l’ouest, à celle avec la Chine, dans le nord-est. Ils ont annoncé ce vendredi avoir pris Islam Qala, le poste-frontière avec l’Iran le plus important d’Afghanistan et d’un poste-frontière majeur avec le Turkménistan, quelques heures après avoir annoncé la prise du plus important poste-frontière avec l’Iran, également situé dans la province afghane de Hérat, dans l’ouest du pays. Le porte-parole du ministère de l’Interieur afghan, Tareq Arian a quant à lui admis que les forces de sécurité ont temporairement quitté les lieux.
Désormais privées du crucial soutien aérien américain, les forces afghanes ont perdu beaucoup de terrain. Mais elles ont assuré avoir repris le contrôle de la première capitale provinciale conquise cette semaine par les insurgés, Qala-i-Naw, au nord-ouest du pays, au terme de violents combats.
Pour l’Iran, le risque fondamental, c’est que les talibans s’emparent du Hazarajat. Donc, qu’ils s’emparent des zones contrôlées par des groupes chiites avec lesquels Téhéran était allié. L’autre élément pour l’Iran, c’est de s’assurer d’une stabilité à sa frontière.
La Russie, de son côté, a affirmé ce vendredi que les talibans contrôlaient « environ deux tiers de la frontière avec la Tadjikistan ». « Nous appellons les parties s’opposant dans le conflit interafghan à faire preuve de retenue et à empêcher une extension des tensions hors des frontières du pays », a déclaré la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, lors d’une conférence de presse. Le Tadjikistan, pays le plus pauvre d’ex-URSS et lié à la Russie dans le cadre de l’Organisation du traité de sécurité collective, possède 1 340 kilomètres de frontière avec l’Afghanistan.
Face à la menace, le président tadjik Emomali Rakhmon a ordonné la mobilisation de 20 000 réservistes pour renforcer la frontière.
L’Iran joue un double jeu assez logique. Le pays essaye de préparer la prise de pouvoir des talibans et de s’assurer que sa position ne sera pas menacée.
RFI