Sen24.info – (Dakar) Une nouvelle géopolitique pourrait se redessiner au Sahel à la suite de la mort d’Idriss Déby Itno, une disparition qui sera ressentie dans ladite région, sur les plans politique, militaire et sécuritaire, analyse Bakary Sambe, le directeur de Timbuktu Institute, un centre d’études consacré à la paix et à la sécurité en Afrique.
Le président tchadien est décédé mardi, après avoir été blessé lors de combats opposant l’armée tchadienne à des rebelles, le week-end dernier.
A la tête du pays depuis trente ans, il devait entamer un sixième mandat pour lequel il a été réélu le 11 avril dernier.
L’armée a annoncé la mise en place d’une transition de dix-huit mois que dirige Mahamat Idriss Déby Itno, un de ses fils et commandant de la garde présidentielle.
Le défunt chef d’Etat ‘’était un allié très important, un pivot capital dans la stratégie de Paris et de la communauté internationale dans la lutte contre le terrorisme au Sahel (…) Dans tous les cas, le Sahel ne sortira pas indemne de cette situation’’, a déclaré Bakary Sambe, interrogé par le quotidien sénégalais Le Soleil sur les conséquences de la mort d’Idriss Déby Itno sur la lutte contre le terrorisme au Sahel.
M. Sambe soutient que ‘’l’impact de la disparition de Déby sera ressenti sur les plans politique, militaire et sécuritaire’’ de la région. ‘’Une nouvelle géopolitique va donc se redessiner’’, a-t-il prédit.
‘’Une grande équation’’
‘’Je ne vois pas aujourd’hui une alternative assez rapide qui va se mettre en place’’, a répondu le directeur de Timbuktu Institute à la question de savoir si la mort d’Idriss Déby Itno va agrandir la marge de manœuvre des groupes terroristes au Sahel.
Mais ‘’il n’est pas à exclure que les nouvelles autorités [tchadiennes] jouent à fond cette carte (celle de la stabilisation du Sahel) parce que c’est [leur] seul gage de légitimité sur le plan international et la seule possibilité d’espérer un soutien international face aux pressions internes et aux troubles sociaux qui ne manqueront pas’’ de survenir au Tchad, a analysé Bakary Sambe.
‘’Sur le plan interne, il y a des risques d’instabilité certains, malgré l’entêtement des militaires et la rapidité avec laquelle son fils a été mis à la tête de la transition. Il y a aussi des risques sur le plan sahélien si on prend en compte le rôle et l’engagement du Tchad dans la lutte contre le terrorisme (…) C’est une grande équation qui se pose à la communauté internationale dans la lutte contre le terrorisme, la France en premier’’, a expliqué M. Sambe.
Il a rappelé le rôle central joué par l’armée tchadienne dans l’antiterrorisme au Sahel et dans les opérations militaires ‘’Serval’’ et ‘’Barkhane’’ menées par la France dans cette région.
‘’Aujourd’hui, ce sont plusieurs inquiétudes qui sont là et qui devront pousser à la réflexion sur le devenir de la situation géostratégique de la région’’, a réagi Bakary Sambe à la mort du dirigeant tchadien.
Il est d’avis que son décès ne facilite pas l’‘’africanisation’’ des troupes antiterroristes tant souhaitée, selon lui, par le président français, Emmanuel Macron, dans les efforts visant à stabiliser la région.
‘’Vers une nouvelle géopolitique du Sahel’’
‘’Je crois qu’on s’achemine inévitablement vers une nouvelle ère’’, a encore prédit le directeur de Timbuktu Institute, rappelant que ‘’l’engagement des forces tchadiennes constitue une garantie de sécurité pour certains pays’’. ‘’Je pense surtout au Mali, au Niger et au Burkina Faso. Il y aura certainement une redistribution des cartes sur le plan géopolitique.’’
Bakary Sambe met en garde contre ‘’un abandon des points stratégiques et essentiels sur lesquels on avait besoin de la présidence du Tchad et de son leadership sur le plan militaire’’.
‘’Je crois que c’est un moment crucial où les cartes se redessinent et où on va (…) vers une nouvelle géopolitique du Sahel’’, a-t-il insisté, rappelant que, sur le plan militaire également, le Tchad préside le G5 Sahel, une organisation de coopération sécuritaire dont sont membres quatre autres Etats sahéliens : Mauritanie, Mali, Burkina Faso et Niger.
APS
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