Sen24.info – (Dakar) Apr\u00e8s le discours du pr\u00e9sident \u00e0 la veille de la 61\u00e8me \u00e9dition de la c\u00e9l\u00e9bration de la f\u00eate de l\u2019ind\u00e9pendance du S\u00e9n\u00e9gal, on a assist\u00e9 \u00e0 des commentaires presque caricaturaux de propagande. Certains porteurs de cette \u00abcom\u00bb en d\u00e9finitive \u00abanti Macky\u00bb, ne pouvaient s\u2019emp\u00eacher de parler pendant 45 secondes sans dire \u00abSon Excellence, le chef de l\u2019Etat, monsieur le pr\u00e9sident de la R\u00e9publique Macky Sall\u00bb.<\/p>\n
Je me suis toujours demand\u00e9 si ces responsables et agents de \u00ab\u00a0com\u00a0\u00bb ont au pr\u00e9alable test\u00e9 leurs \u00e9l\u00e9ments de langage avec leurs propres enfants qui se trouvent \u00eatre les premiers barom\u00e8tres de ce qu\u2019ils veulent dire au grand public.<\/p>\n
Ce besoin de s\u2019adresser en toutes circonstances \u00e0 Macky Sall et de lui renouveler sa loyaut\u00e9 (tant qu\u2019il sera encore au pouvoir) pousse m\u00eame \u00e0 des situations cocasses. On a vu un nouveau directeur de service qui, apparemment, voulait se d\u00e9barrasser d\u2019une centaine de travailleurs (client\u00e8le politique\u00a0?) que son pr\u00e9d\u00e9cesseur lui avait l\u00e9gu\u00e9, dire que c\u2019est une application de la volont\u00e9 du pr\u00e9sident Macky Sall.<\/p>\n
Pour la r\u00e9daction de cet article j\u2019ai compar\u00e9 ce qui se passe au S\u00e9n\u00e9gal avec ce qui se fait en C\u00f4te d\u2019Ivoire et au Rwanda par exemple.<\/p>\n
Ainsi, le mercredi 24 mars 2021, un Conseil des Ministres s\u2019est tenu de 11h00 \u00e0 14h00, au Palais de la Pr\u00e9sidence de la R\u00e9publique \u00e0 Abidjan, sous la pr\u00e9sidence de Son Excellence Monsieur Alassane Ouattara, pr\u00e9sident de la R\u00e9publique, chef de l\u2019Etat. L\u2019ordre du jour de cette r\u00e9union comportait les points suivants :<\/p>\n
A\/-Mesures G\u00e9n\u00e9rales Projet de loi Projets de d\u00e9crets<\/p>\n
B\/-Mesures Individuelles<\/p>\n
C\/-Communications<\/p>\n
Vous n\u2019y trouvez pas les propos du Pr\u00e9sident Alassane Ouattara occupant plus de la moiti\u00e9 du nombre de mots du communiqu\u00e9 du Conseil des ministres comme c\u2019est le cas au S\u00e9n\u00e9gal.<\/p>\n
Je me suis aussi int\u00e9ress\u00e9 au journal d\u2019information de la t\u00e9l\u00e9vision publique du Rwanda que j\u2019ai regard\u00e9 assid\u00fbment pendant une semaine. On y entend \u00e0 peine le nom du pr\u00e9sident Paul Kagam\u00e9. Toutes les politiques, programmes, initiatives et r\u00e9alisations sont faits au nom du Rwanda<\/p>\n
C\u2019est \u00e0 se demander si l\u2019on comprend du c\u00f4t\u00e9 de la \u00ab\u00a0Com\u00a0\u00bb de chez nous que si l\u2019on attribue tout ce qui est bon au pr\u00e9sident de la R\u00e9publique, alors de mani\u00e8re subliminale, on sugg\u00e8re aussi que toutes les fautes doivent lui \u00eatre imput\u00e9es. Aussi gagnerait-on certainement \u00e0 dire aux populations, et surtout \u00e0 la jeunesse (qui est dot\u00e9e d\u2019un \u00e9norme bon sens)\u00a0 : \u00ab\u00a0voil\u00e0 ce qui est possible, voil\u00e0 ce qui est fait, et ce qui reste \u00e0 faire\u00a0\u00bb. Ni le pr\u00e9sident \u00e0 lui seul, ni son gouvernement, ni les autorit\u00e9s locales, qu\u2019elles soient \u00e9lues ou nomm\u00e9es, ne peuvent le faire sans l\u2019implication de tout le monde.<\/p>\n
Pour rappel, il y a de cela quatre ans, Macky Sall qui traversait Dakar, avait constat\u00e9 que sa photo \u00e9tait partout placard\u00e9e sur d\u2019immenses panneaux d\u2019affichage plant\u00e9s le long des voies les plus passantes de la capitale. Le moindre \u00e9v\u00e8nement, pour quelconque et banal qu\u2019il f\u00fbt, \u00e9tait un pr\u00e9texte, pour des responsables politiques de son parti ou de sa mouvance, d\u2019acheter un espace publicitaire dans le but d\u2019y apposer sa photo \u00e0 c\u00f4t\u00e9 de celle du pr\u00e9sident de la R\u00e9publique, pensant ainsi lui faire plaisir.<\/p>\n
Se rendant compte de cette saturation, cette pollution visuelle, le chef de l\u2019Etat a vite fait de penser que ces pratiques qui rel\u00e8vent de la propagande, n\u2019\u00e9taient nullement \u00e0 son avantage. C\u2019\u00e9tait une perception d\u2019autant plus d\u00e9fendable que la propagande est un signe de manque de consid\u00e9ration pour le public auquel elle est destin\u00e9e. G\u00e9n\u00e9ralement, ce dernier ne r\u00e9agit pas imm\u00e9diatement \u00e0 \u00ab\u00a0l\u2019offense\u00a0\u00bb, pr\u00e9f\u00e9rant la garder en m\u00e9moire pour la ressortir plus tard, \u00e0 l\u2019occasion de situations qui n\u2019ont pas n\u00e9cessairement un lien direct avec elle.<\/p>\n
Du reste, ce qui \u00e9tait valable pour cette \u00ab\u00a0over exposure\u00a0\u00bb du pr\u00e9sident de la R\u00e9publique, l\u2019est encore plus avec le langage et les attitudes de ceux qui pensent rendre service \u00e0 leur chef en invoquant son nom \u00e0 propos de tout et de rien. Et c\u2019est encore pire si c\u2019est fait dans un style pompeux ou une aga\u00e7ante grandiloquence.<\/p>\n
Si on veut pr\u00e9senter Macky Sall comme le symbole et le garant des Institutions de la R\u00e9publique du S\u00e9n\u00e9gal, il est impossible de dire \u00e0 notre jeunesse que tout d\u00e9marre en 2012 avec son \u00e9lection.<\/p>\n
De m\u00eame que les propagandistes du pr\u00e9sident Abdoulaye Wade se sont \u00e9vertu\u00e9s \u00e0 vouloir nous faire croire que rien n\u2019\u00e9tait fait au S\u00e9n\u00e9gal avant le 19 mars, 2000, les dithyrambistes de l\u2019actuel chef de l\u2019Etat veulent op\u00e9rer une c\u00e9sure nette dans l\u2019histoire du S\u00e9n\u00e9gal, qui commencerait en 2012.<\/p>\n
Cette fa\u00e7on de faire \u00e9tait toutefois perceptible sous Abdoulaye voire d\u00e9j\u00e0 sous Abdou Diouf. Les partisans de ce dernier s\u2019interdisaient d\u2019invoquer le nom de son pr\u00e9d\u00e9cesseur, le pr\u00e9sident L\u00e9opold S\u00e9dar Senghor, de peur que cela ne soit per\u00e7u comme une remise en cause de la l\u00e9gitimit\u00e9 du nouveau patron. Le pr\u00e9sident Abdou Diouf avait beau \u00eatre un \u00ab\u00a0\u00e9narque\u00a0\u00bb (de l\u2019Ecole Nationale d\u2019Administration de la France d\u2019Outre-Mer \u2013ENFOM) qui tenait \u00e0 g\u00e9rer l\u2019Etat avec des r\u00e8gles strictes, d\u00e8s sa prestation de serment le 1er janvier 1981, tous les symboles qui \u00e9voquaient le nom de son pr\u00e9d\u00e9cesseur avaient \u00e9t\u00e9 effac\u00e9s de la vue et de l\u2019ou\u00efe de ses concitoyens. C\u2019est ainsi que la \u00ab\u00a0d\u00e9senghorisation\u00a0\u00bb a \u00e9t\u00e9 mise en place, alors m\u00eame que ses animateurs,\u00a0communicants, communicateurs \u00e9taient ceux-l\u00e0 qui avaient cautionn\u00e9 des h\u00e9r\u00e9sies consistant \u00e0 avoir des \u00ab\u00a0jingles\u00a0\u00bb d\u2019\u00e9missions d\u2019information \u00e0 la radio nationale qui s\u2019ouvraient sur \u00ab\u00a0 L\u00e9opold doomu yaay \u00f1ilaan baaxna\u00a0\u00bb.<\/p>\n
On a connu les m\u00eames comportements \u00e0 l\u2019\u00e9poque de Senghor, \u00e0 des niveaux d\u2019une plus grande cruaut\u00e9 concernant le Pr\u00e9sident Mamadou Dia. On ne s\u2019\u00e9tait pas content\u00e9 de tout faire pour effacer son nom et son image de l\u2019histoire du S\u00e9n\u00e9gal. Il a \u00e9t\u00e9 injustement diabolis\u00e9 en utilisant les moyens les plus infamants pour se \u00abd\u00e9barrasser\u00bb de lui pour de bon. Et cela \u00e9tonne encore que cette entreprise de diabolisation n\u2019ait pas \u00e9t\u00e9 rectifi\u00e9e par Abdou Diouf, devenu pr\u00e9sident de la R\u00e9publique, lui qui a \u00e9t\u00e9 un des proches collaborateurs du Grand Maodo, nom que lui avaient donn\u00e9 avec respect, beaucoup de S\u00e9n\u00e9galais. Il aura fallu la r\u00e9fection, sous Macky Sall, du Building administratif, si\u00e8ge du premier gouvernement s\u00e9n\u00e9galais dont Dia \u00e9tait le Pr\u00e9sident du Conseil, pour se souvenir des grands services qu\u2019il a rendus \u00e0 notre pays.<\/p>\n
Tout ceci pour dire que si nous voulons que notre jeunesse, la principale cible de toute communication politique, puisse penser le S\u00e9n\u00e9gal en termes de R\u00e9publique qui vaille tous les sacrifices, il faut \u00e9viter de se l\u2019approprier. Si nous continuons \u00e0 segmenter l\u2019existence de la R\u00e9publique en p\u00e9riodes correspondant aux magist\u00e8res de ceux qui l\u2019ont dirig\u00e9e, nous n\u2019aurons que des \u00ab\u00a0R\u00e9publiques partisanes\u00a0\u00bb.<\/p>\n
On ne peut pas dire \u00e0 quelqu\u2019un qui critique Senghor, Abdou Diouf, Abdoulaye Wade ou Macky Sall, qu\u2019il attaque la R\u00e9publique du S\u00e9n\u00e9gal. Et pourtant c\u2019est ce \u00e0 quoi nous assistons depuis le d\u00e9part de Senghor en 1980. Et l\u00e0 malheureusement, la quantit\u00e9 se transformant en qualit\u00e9, la p\u00e9riode Macky Sall, qui correspond \u00e0 un plus grand besoin d\u2019une communication destin\u00e9e \u00e0 la jeunesse, semble pourtant faire montre de plus de surdit\u00e9 communicationnelle. Oubliant que parler \u00e0 la jeunesse, c\u2019est communiquer humblement.<\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":"
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